"Le contexte actuel est favorable à une accélération de la mise en œuvre de l'affichage environnemental. En effet, la montée de la préoccupation environnementale en France, mais aussi en Europe est régulièrement constatée", estime Philippe Dutruc, rapporteur de l'avis (1) du Conseil économique, social et environnemental (Cese) sur l'affichage environnemental, présenté le 26 mars.
Alors que les travaux français sur l'affichage environnemental multi-critères ont démarré en 2009 et ont été suivis d'une expérimentation européenne lancée en 2013, peu de mesures concrètes ont abouti depuis…
Consolider la méthodologie
L'affichage environnemental devrait comporter deux niveaux. L'un sous la forme d'une note pour favoriser une lecture rapide. L'autre sous une forme dématérialisée donnant un accès à des informations détaillées.
L'analyse de cycle de vie (ACV), qui sert de base à cette notation, devra être améliorée. Le Cese recommande d'ouvrir la gouvernance en y associant les associations, les instances spécialisées comme l'Agence française de la biodiversité pour les aspects liés à la biodiversité…
Enfin, le référentiel général établi par l'Ademe en 2011 (le BPX 30-323-0) devrait faire l'objet d'une procédure de normalisation, estime le Cese.
"Fin 2016, cinq secteurs pilotes (habillement, les produits électriques-électroniques, l'ameublement, les produits alimentaires et l'hôtellerie) se sont lancés dans une expérimentation volontaire de l'affichage environnemental", rappelle-t-il. La feuille de route sur l'économie circulaire prévoyait d'étendre cette expérimentation à d'autres secteurs en 2018. "Or, lors des différentes auditions, que cela soit au niveau de l'Ademe, du [ministère de la Transition écologique et solidaire] ou des producteurs, il est apparu qu'aucune initiative, ni décision politique, n'a été prise dans ce sens", regrette le rapporteur.
Le Cese demande donc une mise en oeuvre dès 2019 de cet engagement afin "que l'expérimentation française ne reste pas lettre morte et qu'elle puisse continuer à être une source d'inspiration au niveau européen".
Les décisions politiques et les moyens tardent à venir
Pour l'heure, les moyens ne semblent pas au rendez-vous, déplore Philippe Dutruc. "Lors des auditions, le Cese a constaté que les services en charge de la mise en œuvre de l'affichage environnemental, en dépit de leur très fort engagement sur le dossier, étaient en effectifs limités et attendaient des décisions politiques fortes qui tardaient à venir et qui ne leur permettaient pas de mettre en œuvre de façon efficace cette politique".
Pourtant, les différentes expérimentations ont montré la pertinence d'un tel dispositif. Y participent des acteurs comme Décathlon, l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie (UMIH), Fnac-Darty, Camif et Casino, accompagnés par l'Ademe. Trois des cinq secteurs pilotes (l'habillement, l'électronique et l'ameublement) ont achevé l'expérimentation et seraient mûrs pour une généralisation du dispositif. "Les premiers retours d'expérience sont encourageants avec la possibilité d'obtenir des affichages comparables entre plusieurs entreprises d'un même secteur (la méthodologie et le visuel sont communs) et des référentiels exploitables", note le Cese.
Ce dernier appelle le ministère et l'Ademe à profiter de la clôture de l'expérimentation, mi 2019, pour organiser un événement de bilan et de valorisation des actions menées. La direction des fraudes (DGCCRF) devrait y être associée pour évaluer la qualité de l'information fournie.
En parallèle, des efforts doivent encore être menés pour harmoniser les méthodes de calcul, les outils, améliorer la base de données et les mettre à la portée des petites entreprises. "L'Ademe, lors de son audition, a reconnu que l'on se trouve à un tournant dans cette expérimentation avec des questionnements sur la gouvernance, le financement ainsi que la mise à jour de la "base de données Impacts", la généralisation de cet affichage et l'harmonisation avec l'expérimentation européenne en cours".
Des avancées dans le cadre des travaux sur l'économie circulaire
La mise en oeuvre de la feuille de route sur l'économie circulaire, et sa traduction dans une loi cette année, est l'occasion de relancer les travaux sur l'affichage environnemental estime le Cese.
La feuille de route contient en effet "un certain nombre de mesures liées à l'affichage environnemental" : l'extension de l'expérimentation pilote, mais aussi l'obligation d'information sur la disponibilité des pièces détachées pour les équipements électriques, électroniques et l'ameublement et l'affichage obligatoire à partir du 1er janvier 2020 d'un indice de réparabilité. "Les notions de « durée de vie des produits » et/ou de « réparabilité » nécessiteraient d'être prises en compte d'une façon explicite dans l'affichage environnemental", note le rapporteur, sous la forme d'un logo par exemple.
La secrétaire d'Etat à la transition écologique et solidaire Brune Poirson, présente lors de la présentation de l'avis du Cese, a affirmé la volonté du gouvernement d'accélérer sur l'affichage environnemental dans le cadre des travaux sur l'économie circulaire, notamment sur la réparabilité ou la durée de vie des produits. En revanche, elle a laissé entendre que la mise en place d'un affichage multi-critères serait plutôt porté à l'échelle européenne.